sticker cinema bobine filmQu'ont retenu les bibliothécaires de leurs petits et grands écrans cette année ?

Séries, fictions et documentaires, blockbusters et raretés, nouveautés et rééditions inédites, voilà nos sélections, subjectives autant qu'éclectiques.

  

 

 Le top 9 ciné de Yann-Aël

  • « Unrueh (Désordes) » de Cyril Schäublin : un géographe russe égaré en Suisse, des horlogères anarchistes, de sérieux messieurs en blouse qui chronomètrent à peu près tout, des gendarmes affables qui souhaitent une bonne journée, le ballet infiniment gracieux des mains d’une ouvrière expliquant le mécanisme d’une montre à un Kropotkine béat. La naissance de l’aliénation moderne et l’esquisse d’une alternative. Un film d’une intelligence et d’une délicatesse rare.
  • « Trenque Lauquen » de Laura Citarella : une femme qui disparaît, une correspondance amoureuse cachée dans une bibliothèque, une mystérieuse apparition près d’un lac – des récits qui s’enchâssent et se croisent, des indices qui se multiplient et des questions auxquelles on n’est pas sûr de trouver réponse. Un film-labyrinthe fabuleux et envoûtant.
  • « Toute une nuit sans savoir » de Payal Kapadia : une jeune étudiante en cinéma écrit à l’amant qui l’a délaissé, tandis qu’à l’écran défilent les images d’un jeunesse révoltée et éprise de liberté, de soirées festives en manifestations houleuses. Entre ciné-tract collectif et journal intime imaginaire, un film-luciole pour tenter de percer l’écrasante nuit totalitaire.
  • « The sweet east » de Sean Price Williams : que se passe-t-il quand Alice au Pays des Merveilles se retrouve dans l’Amérique de Trump ? un film qui ressemble au rock lo-fi des années 90 – drôle, foutraque, tendre et incisif, radicalement et joyeusement désespéré, à l’image de son sous-titre (« everything will happen »).
  • « La chimère » d’Alice Rohrwacher : peut-être pas celui que l’on préfère de ses films (après le naturalisme poétique de « Les merveilles » et la fable mystique « Heureux comme Lazzaro ») mais le cinéma d’Alice Rohrwacher –sa peinture d’une Italie rurale flottant entre mythe et modernité, son onirisme teinté de mélancolie - est de celui qui nous touche droit au cœur.
  • « Knit’s island » d’Ekiem Barbier, Guilhem Causse et Quentin L’Helgouac’h : belle surprise que les pérégrinations de trois documentaristes dans un jeu vidéo.
  • « Un prince » de Pierre Creton : film après film, le cinéaste poète et paysan poursuit une œuvre singulière, à la fois ancrée dans le quotidien et merveilleusement utopique, dessinant les contours d’une communauté ouverte dans laquelle on s’interroge sur les rapports entre l’homme et l’animal (« Secteur 545 »), où l’on recueille des sangliers (l’extraordinaire « Va, Toto! »), on héberge des réfugiés (« Le bel été »), on se passionne pour les plantes et on baise entre garçons (« Un prince »).
  • « Rewind and play » d’Alain Gomis : portrait d’un Thelonious Monk pour le moins rétif au formatage du dispositif médiatique. Où quand le jazz ne rentre pas dans la boîte... (Prix du film-qui-aurait-dû-être-dans-le-top-2023)
  • « Zorn I, II, III » de Mathieu Amalric : 3 films sur John Zorn – son enthousiasme et son exigence, ses musiques (du free jazz au klezmer en passant par la musique de film, ses improvisations à l'orgue ou ses compositions pour quatuor à cordes), ses projets (concerts, répétitions), ses compagnons de route (Dave Douglas, Marc Ribot, Julian Lage, John Medeski, Mike Patton, Barbara Hannigan, etc). Un film sur l'amour (passionné, passionnel) de la musique.

Mentions spéciales : le bel éloge de la fuite de « Los delincuentes » de Rodrigo Moreno, les drôles de séances chez le psy dans « Fremont » de Jalali Babak, les petites canailles de « Riddle of fire » de Weston Razooli, la promenade dans la peinture de « Danses macabres, squelettes et autres fantaisies » de Rita Azevedo Gomes, la performance glaçante de Sandra Hüller dans « La zone d'intérêt » de Jonathan Glazer et, du côté des rééditions longtemps attendues, l'œuvre complète de Jean Eustache et les films de Carl Theodor Dreyer…

 

Le top d'Emilie :

  • « La Zone d’intérêt » de Jonathan Glazer, pour son travail sur le son et l’image qui nous amène à nous interroger sur notre propre indifférence.
  • « Il reste encore demain » de Paola Cortellesi, une version contemporaine de la comédie italienne et un beau portrait de femme.
  • « Riddle of Fire » de Weston Razooli, sorte de film-bonbon hommage aux jeux de rôles qui raconte comment quatre ados partent en quête d’un œuf moucheté pour cuisiner une tarte à la myrtille. Si ça, ça ne vous donne pas envie de regarder un film...
  • « Trenque Lauquen » de Laura Citarella, surtout sa première partie en forme d’enquête littéraire et romantique, avec des plans qui semblent parfois sortis d’un film des années 50.
  • « La Chimère » d’Alice Rohrwacher, pour le charmant Josh O’Connor à la recherche de son amour perdu dans une Italie de tombes étrusques, de danses sur la plage et de villas défraîchies.
  • « Désordres » de Cyril Schäublin et ses cadres décalés qui soulignent avec humour l’absurde du quotidien dans la Suisse des débuts de l’industrie de l’horlogerie, pour créer une image « plus fragile », selon la très belle expression du réalisateur.
  • « Six femmes pour l’assassin » de Mario Bava, classique précurseur du sanglant « giallo » et sa photographie sublime, entre couleurs vives et travail sur les ombres.
  • « Enys Men » de Mark Jenkin, film de folk horror expérimental très angoissant pour ceux qui aiment les histoires de fantômes à l’anglaise, les îles abandonnées et les films de Nicolas Roeg.
  • « Il buco » de Michelangelo Frammartino, dans lequel (presque) aucun mot n’est prononcé et où tout est beau.
  • « Ordet » de Carl Theodor Dreyer, qui mérite bien son statut de classique de l’histoire du cinéma tant on reste saisi par sa maîtrise technique et la puissance évocatrice de ses personnages.

 Le top 10 ciné de Florian

  • "Les Colons" de Felipe Galvez Haberle : western crépusculaire et historique sur la colonisation des terres australes de l'Amérique du Sud entre Argentine et Chili, et le massacre des populations autochtones au début du 20ème siècle. Une dénonciation radicale d’une colonisation violente et invisibilisée, qui résonne avec l’actualité.
  • "They shot the piano player" de Fernando Trueba et Javier Mariscal : Magnifique animation pour illustrer cette enquête journalistique sur la disparition du pianiste brésilien Francisco Tenorio Jr. en 1976. Une ode à la bossa nova et une réflexion sur les années de plomb en Amérique du Sud.
  • "L'étoile filante" de Dominique Abel et Fiona Gordon : Le duo Abel et Gordon continue à faire des films avec toujours aussi peu de moyens , mais toujours autant de poésie et de moment de grâce dansé. Laissez vous embarquer dans ce thriller loufoque et émouvant.
  • "Le procès Goldman" de Cédric Kahn : film de procès mais surtout film historique, politique et philosophique qui donne à penser sur les institutions policières et judiciaires, sur le racisme, sur le rapport entre les moyens de l'action politique et ses fins...
  • "Dissidente" de Pier-Philippe Chevigny : film social et politique sur l'exploitation des travailleurs guatémaltèques dans les entreprises québécoises, qui décrit avec finesse et émotion les rapports de force d’une économie qui broie autant les dominés que les dominants.
  • "Fremont" de Babak Jalali : film en noir et blanc sur l’exil d’une Afghane en Amérique, employée d’une usine de “fortune cookies”. Drôle, décalé et émouvant.
  • "N'attendez pas trop de la fin du monde" de Radu Jude : film déroutant et intrigant dans le Bucarest d'aujourd’hui où les multinationales corruptrices ont remplacé l’État socialiste corrompu. Fabuleux plan séquence de 30 minutes en conclusion.
  • "Godzilla Minus One" de Takashi Yamazaki : oui un blockbuster avec un très gros monstre ! Visuellement impressionnant mais en plus bien écrit, ce 37ème film sur Godzilla est aussi l'occasion pour le réalisateur japonais de parler de la guerre et des traumatismes qu'elle engendre.
  • "Le balai libéré" de Coline Grando : film documentaire qui fait dialoguer deux générations de travailleurs-euses. Dans les années 70, les femmes de ménage de l’université catholique de Louvain mettent leur patron à la porte et créent leur coopérative de nettoyage, Le Balai libéré. 50 ans plus tard, le personnel de nettoyage de l’Université rencontre les travailleuses d’hier : travailler sans patron, est-ce encore une option ?
  • "Vivre avec les loups" de Jean-Michel Bertrand : 3ème voyage aux côtés du cinéaste animalier spécialiste du loup. Après avoir documenté avec poésie la réinstallation du loup en France, Jean-Michel Bertrand donne la parole à des acteurs de terrain qui apprennent à cohabiter avec le prédateur.

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