Les ap
parences sont trompeuses...
L’homme aux mille visages de Sonia Kronlud aux éditions Grasset (2024)
Elles s’appellent Marianne, Kasia, Carolina, Neuci, Ingrid… Elles ne se connaissent pas et pourtant, elles ont toutes un point commun : un homme. Il se fait appeler Ricardo, Alexandre, Daniel ou encore Richard, tout dépend de la relation qu’il construit avec la femme et le pays où il se trouve. Chacune pense être la seule femme dans la vie de cet homme. Or, il cumule les conquêtes, les histoires rocambolesques à travers le monde entier. Il a suffi d’une absence, d’une suspicion pour que l’une d’entre elles, Marianne, découvre le pot aux roses. Quelques dossiers dans l’ordinateur, un clic de souris et voilà qu’elle découvre qu’Alexandre n’a jamais été l’homme qu’il prétendait être. Elle est enceinte de cinq mois. La vie qu’elle pensait construire vole en éclats. Elle contacte une auteure, Sonia Kronlud, qu’elle connait grâce à une amie commune. A l’issue de leur rencontre, elle décide de témoigner de son histoire amoureuse. En l’écoutant, Sonia se remémore son passé et prend la décision de retrouver les femmes qui ont été manipulées afin de recueillir leurs histoires et surtout, retrouver Ricardo pour comprendre les véritables intentions de cette machination.
Connaissons-nous vraiment les personnes qui nous entourent ? C’est la question que nous pouvons nous poser en refermant l’enquête de Sonia Kronlud. Comment un homme a-t-il pu créer autant d’identités différentes pendant vingt ans sans jamais être démasqué ? Ricardo (de son vrai nom) a commencé ses manipulations psychologiques au tout début des années 2000 jusqu’à l’après-Covid. Cet essai est édifiant tant les situations nous paraissent improbables. Les histoires de Ricardo sont si plausibles qu’il est évident que les femmes n’ont rien vu venir, car Ricardo est extrêmement malin. Il peaufine ses histoires jusqu’au moindre détail (que cela soit sur sa famille, sur ses différents métiers). Il se documente à la perfection pour être précis dans ses explications et pour que l’on ne mette jamais sa parole en doute. Cet essai peut faire écho au documentaire Netflix, l’Arnacoeur de Tinder sorti en 2022 où l’on suit l’enquête sur Simon Leviev, un homme qui a escroqué plusieurs femmes. Simon Leviev les rencontrait grâce à l’application Tinder, avant de se mettre en ménage avec elle, leur promettant monts et merveilles puis finissant par les arnaquer et les menacer si elles ne lui donnaient pas d’argent. Entre 2017 et 2019, il a escroqué plus de 10 millions de dollars. A la sortie du documentaire, Kate Konlin, sa compagne de l’époque, a été obligée de mentir et de le défendre pour se protéger des violences psychologiques qu’il lui faisait subir. Deux histoires différentes avec un même mot d’ordre : la manipulation.
Amélie
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Extrait
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C’est un moment dont Marianne garde un bon souvenir. En réécoutant la conversation, elle continue à se rappeler un moment de bonheur simple et joyeux. Même si elle sait maintenant que tout ça est une mise en scène et qu’il n’y avait personne au bout du fil, elle a été heureuse à ce moment-là et ce sentiment agréable traverse les années, sans être entaché de fausseté ou duperie. Elle-même en est surprise. Cette évocation m’interroge : comment cette émotion peut-elle rester intacte dans sa mémoire, pourquoi sa perception est-elle inchangée alors qu’elle repose sur une illusion ? Le plaisir, la joie, la colère, la tristesse sont-ils entièrement indépendants du vrai et du faux ?