Danse solennelle, lente et élégante...
...le nom de "pavane" viendrait soit de "Padua" ou "Padova" (Padoue, en Italie), soit de de l'espagnol "pavo" (le paon, faire le paon, c'est-à-dire : se pavaner). Dédiée en 1899 à Madame la princesse Edmond de Polignac, la Pavane pour une infante défunte de Maurice Ravel est l'une de ses pages les plus célèbres. Son titre ne fait aucunement référence à une princesse espagnole décédée : « Je n'ai songé, en assemblant les mots qui composent le titre, qu'au plaisir de faire une allitération ! » confesse le compositeur.
Probablement marqué par la Pavane de son maître Gabriel Fauré, qui fut son professeur de composition au Conservatoire de Paris, Ravel se montre particulièrement sensible à cette forme musicale venue tout droit du XVIème siècle : la suite de Ma mère l'Oye s'ouvre également sur une très délicate Pavane de la Belle au Bois Dormant. S'il conserve le caractère majestueux de cette danse, la gravité est ici empreinte de tendresse, la noblesse se teinte d'une sereine mélancolie. D'abord écrite pour piano, l'oeuvre se transforme, avec la version pour orchestre de 1910, en un cérémonial particulièrement feutré et chatoyant.
Le trio mené par Airelle Besson s'empare de la mélodie et décline sa beauté simple et presque langoureuse en y insufflant une part d'improvisation. Cette délicatesse toute en souplesse n'est pas sans évoquer celle d'un autre trompettiste : Chet Baker avait en effet interprété The lamp is low, standard de jazz composé en 1939 par Peter DeRose et Bert Shefter avec des paroles de Mitchell Parish, qui se base explicitement sur la mélodie de la pavane de Ravel, et avait d'abord été gravé par la chanteuse Mildred Bailey (qui, il faut le dire, a fait beaucoup mieux dans le répertoire du blues que cette ballade un peu mièvre). Emblématique d'un certain goût français, voilà donc une pièce qui a fait le tour du monde : pas étonnant qu'on surprenne le trio européen Das Kapital à la fredonner sur un air de berceuse free, avant que le groupe Chicha Libre ne lui fasse prendre quelques couleurs tropicales en l'adaptant à la mode cumbia psychédélique.