Musiques migrantes...
De l'évocation d'un contrôle de passeport quelque peu musclé par le voyageur et claveciniste Johann Jacob Froberger au témoignage des Refugee All Stars, en passant par Hanns Eisler et Bertolt Brecht fuyant le nazisme et la guerre, la musique raconte les tribulations de ceux qui sont ballotés sur les routes. Mais c'est le mal du pays qui saisit au cœur Dahmane Elharrachi, grand chantre de l'émigration algérienne, tandis que Tiken Jah Fakoly décline le "englishman in New York" de Sting sur le mode du sans-papiers à Paris... Kery James solde les comptes et fait une mise au point aussi incisive qu'amère sur l'immigration, tandis que la "Fraternité du Souffle" de Chris McGregor, fuyant l'apartheid à Londres, réinvente en musique une communauté libre, égalitaire et multi-raciale : la musique comme refuge et comme utopie ? La rumba afro-cubaine, en Guinée ou au Congo témoigne elle des allers-retours transatlantiques des rythmes. Enfin, face aux crispations identitaires, faut-il rappeler que le musette, ce si typique "son de Paris", n'est que le bal des Auvergnats exilés revu et corrigé par l'accordéon italien et le swing de la guitare manouche ? Et que le non moins folklorique rébétiko, avant de se vendre aux touristes comme musique "nationale", est né dans les sordides bas-fonds qui accueillaient les indésirables réfugiés d'Asie mineure ?